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Journal d'une adoptée


Je m’appelle Sandra, je suis née le 9 novembre 1981 en Bolivie. J’ai été adoptée vers l’âge de 13 mois. Mes parents adoptifs sont français, originaires de Perros-Guirec en Bretagne. Ils ont essayé d'avoir un enfant durant plusieurs années mais cela n'a pas fonctionné, ils se sont donc tournés vers l'adoption. Je suis arrivée en France en 1982. J’ai une petite sœur que mes parents ont eu deux ans après mon arrivée.


« Mes parents me parlaient de l’adoption quand j’étais petite, mais j'ai toujours été dans le déni. Je me sentais tellement bien comme j'étais, que je ne ressentais pas le besoin d'en parler. »



Je n’ai donc pas mal vécu mon adoption. Il n'y a que vers 36 ans que j'ai vraiment ressenti le besoin d’en parler. Jai perdu mon père à 18 ans. J'ai eu beaucoup de mal à faire mon deuil et je continuais à ne pas me sentir bien, à être triste au fil des années. Mais je ne savais pas vraiment pourquoi.


Ma mère m'a tendu plusieurs fois des perches et me proposait d'accéder à mon dossier, mais j'étais vraiment bloquée. Lorsque j'ai finalement décidé d'accéder à mon dossier, j'ai compris qu'il me fallait des bases. J'ai commencé par une quête de sens – quel sens avait ma vie quotidienne ? mon travail ? – pour arriver à une quête d'identité. J'étais convaincue que je pouvais faire autre chose, car j'ai plutôt suivi une trajectoire qui faisait plaisir à mes parents.


Je me suis vraiment remise en question au moment des attentats à Paris le 13 novembre 2015. J'habitais à Paris à l’époque. Pendant 6 semaines je n'allais pas bien, pour ensuite repartir pour une année de flottement dans ma routine habituelle. A ce moment-là, je me suis vraiment dit que si ma vie s'était arrêtée là, elle n'aurait rien eu de bien exceptionnelle et de bien impactant. Il était donc important pour moi qu'elle ait un impact aussi minime qu'il soit. Pendant plusieurs semaines je me suis posée la question de la reconversion, de ce que j’aurais pu faire qui avait un sens. Et comme en fin d'année j'étais très prise par mon travail (étant dans la finance), je suis retournée à mon insu dans la routine.



Deux ans après les attentats, fin 2016, je me requestionnais sur ma nouvelle orientation. Je suis partie en vacances en Asie. À mon retour j'étais perdue et à cette époque je n'étais pas du tout branchée réseaux sociaux. J'étais un peu seule avec moi-même, perdue. Puis, mi-décembre, j'ai assisté à un séminaire de développement personnel. Je ne savais pas du tout ce que c'était et c'est eux qui m'ont ouvert l'esprit sur d'autres possibilités et sur le fait qu’il y avait d’autres voies si je pensais que ma routine ne me correspondait pas. Cela a vraiment été une révélation pour moi, à partir de là j'ai fait beaucoup d'introspection.


En janvier 2017, je n'en pouvais plus, j'ai posé un congé sabbatique pour vraiment me reconcentrer sur moi, savoir ce que j'avais vraiment envie de faire. Je suis partie en mission humanitaire pendant 3 mois en Équateur, ce qui m'a permis de prendre du recule. J'en avais besoin. J'ai décidé en revenant de ma mission humanitaire de ne pas retourner travailler. C'était une évidence. Je sentais qu'il y avait autre chose et qu'il me fallait un projet qui avait du sens. Puis j'ai fait la rencontre d'Olivier Roland, à l'origine de la formation Blogueur Pro, qui met en valeur la liberté, la liberté de temps et de s'engager. C'est exactement ce que je voulais faire. J'ai suivi sa formation pour créer son Blog. Et comme j'ai été pendant dix ans dans la finance, j'ai décidée de créer le mien sur ce thème. Cela a durée deux ans. Mais au final, comme cela n'a pas fonctionné comme je le souhaitais, je l'ai mis en pause. Puis il y a eu la COVID, j'ai quand même continué en faisant des lives. Cette coupure de deux ans m'a permis de me recentrer sur moi.



J'ai trouvé ma famille biologique par le biais d'une association belge, une personne de cette association d'origine bolivienne aussi, faisait une thèse sur les personnes nées en Bolivie et à la recherche de leurs racines. Il a fait un voyage là-bas juste avant la COVID et a réussi à retrouver ma famille sur place. Les recherches se sont passées plutôt très rapidement. J'ai contacté cette personne en janvier, elle est partie en février et en mars elle a commencé les recherches. Mi-mars tout a été stoppé à cause de la COVID. Mais fin juillet, il m'a rappelé en me disant qu'il avait une belle surprise ! Je pensais qu'il me contactait pour me dire que tout tombait à l'eau.



« J'étais choquée, je suis restée une semaine dans le déni et puis ensuite le soulagement est arrivé. »


À la fin du confinement, j'étais au Canada. Nous avions prévu avec mon compagnon de traverser le Canada d'Est en Ouest ce qui a duré plusieurs mois. D'ailleurs mon compagnon est depuis le début un vrai soutien et le seul, car ma famille et mes amis n'ont pas vraiment compris mes démarches. Je n'ai pas compris à ce moment là leur peur, donc ce soutien a été très important pour moi. C’est vers la fin de mon voyage que j'ai appris que ma mère biologique avait été retrouvée, donc c'est vraiment à ce moment là que j'ai eu un déclic.


Cette personne avait retrouvé une des filles de mes parents biologiques et à partir de là j'ai fait d'autres recherches sur facebook. J'ai retrouvé le profil de ma mère biologique. Je ne peux pour l'instant rien faire et je n'essaie pas de les contacter car c'est la personne qui m'a aidé qui prendra contact avec eux et les préparera psychologiquement quand elle retournera là-bas.



Je me tiens prête à partir et ce temps d'attente m'arrange aussi car cela me laisse du temps pour me remettre à l'espagnol pour pouvoir communiquer plus facilement. Pour moi, c'est devenue une évidence quand je lui ai pardonné. J’ai compris qu'elle avait fait ce geste par amour et pour mon bien-être, pour que j'ai une belle vie. J'ai donc envie de la retrouver pour lui dire merci, parce que j'ai eu effectivement une belle vie, même si j'ai eu beaucoup de tristesse quand j'ai perdu mon père. J'ai fait des études, j'ai réussi. Je n'aurais pas pu avoir cette vie là-bas, et j'ai eu de la chance d'être élevée dans une famille avec de l'amour car ce n'est pas forcément le cas chez tous les enfants adoptés.



« Au départ j'ai eu du mal à digérer l'information, mais ensuite je me suis sentie tellement bien... un sentiment de plénitude. »



Je me suis dit que j'avais besoin de parler de mon adoption, de raconter mon histoire, avec à la base l'envie d'écrire un livre. Mais je me suis plutôt dirigée dans la création d'un nouveau blog sur l'adoption. Cela a été un peu une sorte de thérapie pour boucler la boucle. J'ai donc décidé de le faire comme un journal. Je souhaitais faire des vidéos mais c’était trop compliqué, j'ai donc choisi de faire un podcast [ "Journal d'une adoptée", NDLR ]. J'ai lancé le premier épisode le 20 septembre 2020, pour raconter mon histoire, au départ. J'ai eu de bons retours. Puis j'ai fait des témoignages d'autres adoptés, histoire de donner de l'espoir aux personnes qui, dans cette position, sont perdues. C'est vraiment le message que je souhaite faire passer par le biais de mon podcast.


J'ai fait beaucoup de belles rencontres dont les histoires peuvent être par moment très difficiles à entendre. Je m'attendais pas du tout à ce que j'allais découvrir quand j'ai mis les pieds dans ce monde là. La première histoire marquante a été celle de deux connaissances, rencontrées dans des groupes orientés sur l'adoption, qui étaient issues du trafic d'enfants. Je n'avais pas du tout conscience de cette réalité là, ce qui m'a confortée dans l'idée que j'avais eu beaucoup de chance d’avoir été confiée par ma famille et non arrachée à eux. Et du coup j'ai eu envie de faire d'autres rencontres d'adoptés qui souhaitaient raconter leur histoire, pour avoir plusieurs ressentis. Cela m'a permis de me remettre en question, d'avoir une autre vision des choses.

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